Comment stimuler l’engagement des collaborateurs dans un monde en pleine évolution ?

Un article de Marie Laoureux - 9 octobre 2023

C’est autour de cette question que nous avons échangé ce 22 septembre au Bluepoint à Bruxelles. 90 professionnels de la communication se sont rassemblés pour écouter des orateurs de choix et participer à un “World Café” en compagnie d’Aurélie Renard, fondatrice d’Innerside et communicante depuis plus de 20 ans.

 

Les 4 moments forts de cette journée :

  • L’engagement en entreprise au regard des mouvements mondiaux vécus ces dernières années. Avec Pascale Giet, Directrice de la communication du Groupe Transdev.
  • L’importance de la certification B Corp pour l’engagement des collaborateurs. Avec Alice Lemesle, Sustainability Manager chez Danone Belux et Stephane Buisseret, Président de AIR Agency.
  • La place du communicant interne dans l'écosystème des fonctions d'accompagnement des collaborateurs. Avec Véronique Guilmot, DRH du Grand hôpital de Charleroi et Jérôme Bouvy, philosophe du Grand hôpital de Charleroi, Jérôme Van Lidth, coach BAO Academy, Didier Steinfeld, Fondateur DST Consulting- Expert en change management.
  • Partage de créativité et d’idées lors d’un “World Café” pour réinventer la communication interne. Avec Aurélie Renard.

 

Le monde change, les entreprises doivent s’adapter pour rester attractives, sinon elles mourront !

Ces dernières années ont été marquées par d’importantes évolutions mondiales, qu’il s’agisse de changements environnementaux, politiques, ou numériques. Aujourd’hui, tout s’accélère. Nos entreprises se trouvent dans un tournant face à l’impatience, à la démotivation, au manque d’engagement et aux exigences des collaborateurs. Nous aspirons à une transformation qui, pour beaucoup, ne vient pas assez rapidement ou intensément. Face à cela, les entreprises doivent s’adapter, innover et créer de nouvelles dynamiques pour répondre à de nouvelles aspirations.

 

Un besoin crucial de qualité de vie, d’autonomie et de reconnaissance émerge.

Hier, les collaborateurs s’ancraient pendant des années au sein d’une entreprise. On se souciait peu de garder ses collaborateurs : ils restaient. Un peu de considération et une augmentation de temps à autre et le tour était joué !

Aujourd’hui, la tendance change. Il devient rare de consacrer toute sa carrière à une seule organisation. L’objectif est donc de maximiser l’engagement des collaborateurs, de construire ensemble de belles initiatives, en étant conscient qu’ils partiront peut-être un jour.

Désormais, tant la fidélisation que l’attrait d’une entreprise représentent un défi. N’oublions pas qu’un turn over élevé pénalise l’entreprise tant sur le plan financier que sur celui de son efficacité.

Hier, l’engagement était lié à la performance. Être engagé, c’était délivrer. Aujourd’hui, l’humain est (ou devrait être) au centre de tout. Il sait pourquoi il s’engage. Il est en quête de sens. Il a besoin d’être reconnu, autonome, respecté en terme de qualité de vie et il souhaite être partie prenante des décisions prises au sein de l’entreprise pour laquelle il travaille.

Même si la Covid a permis d’instaurer le télétravail partiel en principe de base, on observe encore beaucoup d’entreprises qui, paradoxalement, cultivent un surcroît de contrôles. Malgré les discours autour des valeurs, les contrôles et les reporting se multiplient. On utilise des KPI’s pour tout. Ce phénomène donne l’illusion que tout est mesurable alors que nous vivons dans un monde où il est nécessaire de laisser de la place à la créativité et à la confiance. On arrive ainsi à des injonctions paradoxales. Ce qui est promis n’est, dans les faits, pas respecté.

Aujourd’hui, les entreprises ne parviennent plus à combler les besoins fondamentaux des individus, ce qui les incite davantage à opter pour l’indépendance. En effet, depuis trois ans, l’entrepreneuriat connaît un véritable essor. Cette aspiration à l’indépendance professionnelle ne devrait-elle pas être une préoccupation majeure pour les dirigeants d’entreprise ?

 

4 leviers de transformation pour générer davantage d’engagement :
Partagé par Pascale Giet, auteure du livre “La grande impatience”

1)    Définissons la raison d’être de notre entreprise

Prendre le temps de réflexion et oser être différent des autres en matière de discernement, d’innovation, de management est essentiel. Mettons du sens et donnons de la profondeur à nos mots.

2)    Suscitons la participation des collaborateurs

“Plus on implique, plus je m’implique”. Créons de la responsabilisation en passant par l’écoute des collaborateurs. Laissons leur de l’espace pour s’exprimer afin de co-construire et d’incarner une culture d’entreprise forte et attractive pour le futur. C’est ensemble que nous devons définir le “comment” travailler pour susciter l’engagement.

3)    Cultivons la proximité, le lien et la liberté

Peu importe la taille de l’entreprise, la création de liens entre les collaborateurs est essentielle. Chacun doit comprendre qu’il joue un rôle dans un collectif (pourquoi et comment), chacun a besoin d’être reconnu pour son travail. Ouvrons des espaces de reconnaissances, organisons des événements sur mesure en lien avec les attentes des collaborateurs, optons pour un management et une communication plus individualisés. Soyons proches les uns des autres.

4)    Favorisons la diversité

Savoir valoriser les divergences est également moteur de créativité et d’innovation. Cela contribue à établir une culture d’entreprise plus robuste et plus enrichissante.

Notre oratrice termine son intervention par une citation d’Antoine de Saint-Exupéry “ Nul ne peut se sentir, à la fois, responsable et désespéré”. Soyons responsable pour changer ce monde et faire en sorte que notre travail soit le plus épanouissant possible.

 

L’engagement sociétal peut-il, lui aussi, être un levier d’engagement pour les collaborateurs ?

Initié aux Etats-Unis, le label B-Corp (“Benefit Corporation”) reconnaît les entreprises qui ont un impact positif sur la société et sur l’environnement. Aujourd’hui, plus de 2.600 entreprises de plus de 60 pays ont obtenu cette certification. Danone et Air Agency en font partie et Alice Lemesle, Sustainability Manager chez Danone Belux et Stephane Buisseret, Président de AIR Agency, nous ont partagé leurs motivations et leur parcours.

Du côté de Danone, la responsabilité sociétale est ancrée dans l’ADN du groupe depuis 1972. Mais la durabilité est un concept multifacette qui englobe diverses dimensions d’une entreprise. B-Corp facilite l’intégration et la démystification de cette responsabilité sociétale. En rejoignant ce mouvement collectif, Danone renforce ses valeurs et avance vers une vision idéale de société. De nombreux collaborateurs jouent un rôle important dans l’obtention de cette certification. Elle suscite un engagement profond de la part des équipes, car elle résonne avec ceux qui sont fiers de soutenir cette initiative.

Dans une société compliquée, Air Agency a choisi de faire partie de la solution en effectuant le processus de certification B-Corp. Afin de ne pas faire passer ce projet profitable après les clients, des experts ont été engagés pour accompagner l’entreprise dans cette démarche. Les collaborateurs, eux, ont été les sponsors. Ils ont encouragé ces consultants et ils les ont aidé à avancer. Tout le monde trouve du sens à cette démarche. C’est du “culture up” et c’est un investissement très positif !

Dans les entreprises, les valeurs revêtent une importance capitale. Cependant, elles peuvent parfois rester théoriques et ne pas se manifester au quotidien. L’engagement sociétal et la certification B-Corp concrétisent ces valeurs. Une entreprise qui ne s’investit pas dans une démarche de durabilité mourra dans les 5 ans !

La certification B-Corp : un critère d’attractivité pour les candidats ?

Lors d’entretien d’embauche aujourd’hui, l’alignement des valeurs est établi dès le départ. On aborde d’abord ce sujet avant même de discuter des compétences. Il est important à la fois pour l’entreprise et pour le candidat qu’il y ait un “match”. La certification B-Corp rend cette discussion et ce storytelling très lisible.

 

La pensée fait partie du travail

Après la crise du Covid, les travailleurs se sont posés beaucoup de questions sur le sens de leur travail. Consciente de cette remise en question, Véronique Guilmot, DRH du Grand hôpital de Charleroi, a engagé Jérôme Bouvy, philosophe du travail hospitalier. Pourquoi ? Entre autres, pour aider les soigneurs à retrouver ce sens en pensant avec eux, avec une pensée vivante et active. Pour construire la narration de la culture d’entreprise par et pour les collaborateurs. Pour déployer des leviers efficaces pour s’adresser aux individus de manière humaine. Jérome a, notamment, mis en place “les ateliers philo”, un moment durant lequel, sur leur temps de travail, les soigneurs peuvent penser et s’exprimer. Ces échanges et surtout le fait de se sentir écouté et entendu, motive les travailleurs. Et comme dit Véronique : “Un collaborateur motivé égale un patient choyé” ! Cette démarche est donc essentielle !

Nous vivons dans un monde dans lequel il y a de plus en plus de pression, dans lequel nous avons de plus en plus à faire, comment fait-on pour ne pas se sentir oppressé ? Nous sommes tous des êtres humains. Des humains qui pensent, ressentent et agissent. Il est aujourd’hui capital de remettre l’humain au centre des préoccupations des entreprises !

Osons valoriser les émotions et les interactions, car elles renforcent la cohésion entre collègues ainsi que le sentiment d’appartenance à une entreprise. Même face à des éléments immuables, en équipe, nous pouvons toujours chercher des moyens de prendre soin de nous malgré des contraintes imposées. Nous avons également la liberté de refuser certaines situations.

Attention qu’il faut différencier le rôle du philosophe, à la recherche de la vérité, de celui du coach, à la recherche du bien-être et du bonheur.

 

Le métier de communicant est en pleine mutation et rencontre de nouveaux défis.

Les conclusions de la matinée ont été données par François Pichault :

  • Malgré la dominance et la puissance du digital, nous devons remettre l’humain au cœur de la communication interne. Le communicant devient un coach, un formateur et un planificateur.
  • Au-delà des plans de com’, nous devons implémenter la dimension du “care” dans nos réflexions.
  • Le communicant doit créer des moments pour (re)penser le travail au travers de leviers didactiques et de moments formels chouettes.
  • Le communicant doit construire des partenariats (avec les managers, les RH, …)
  • La communication interne doit être utilisée comme levier pour renforcer les liens intra et inter-équipe.
  • Le communicant privilégie la sobriété communicationnelle.
  • Plus que jamais, le communicant doit personnaliser ses messages et définir les bons canaux de diffusion de ceux-ci (simples et accessibles).

Face à une perte tangible de motivation et de sens chez les collaborateurs, les communicants ont un vrai rôle à jouer pour ré-insuffler ce sens. Mais d'où vient-il ? Le sens ne doit pas toujours être dicté par la hiérarchie. Il doit émerger de plusieurs voix (polyphonie). Le top management doit fournir un cadre, des objectifs, tout en responsabilisant l’équipe elle-même ! “Et moi, comment puis-je établir un lien entre ma tâche quotidienne et la mission globale de l’entreprise ?”. Chacun doit être et se sentir acteur, à son niveau. Pour ce faire, le communicant devra aller sur le terrain, écouter, interagir avec les employés et les faire participer aux processus décisionnels de l’entreprise. Il est question de penser activement avec les employés et non pas à leur place !

Les professionnels de la communication endossent aujourd’hui également des rôles de coach, de formateur et de stratège visant à redonner du sens au travail, à réduire les directives contradictoires pour mobiliser la culture d’entreprise comme un moyen pour atteindre les ambitions stratégiques de l’entreprise.

Par ailleurs, même si on est pressé par le temps, même si on a des tas de choses à dire en un minimum de temps, il est parfois nécessaire de retrouver une sobriété communicationnelle pour éviter une saturation des informations.

Privilégions la culture de l’échange, du feedback et du dialogue plutôt que de courir vers le conflit !

 

 

Participer à la discussion

Vous souhaitez être tenu au courant des prochaines publications ?